Brive-la-Gaillarde
Identification
Environnement géographique
Situation
Brive-la-Gaillarde est aménagée le long de la vallée de la Corrèze, historiquement et majoritairement en rive gauche de celle-ci, dans une plaine alluviale en grande partie marécageuse et inondable, recevant plusieurs affluents (ruisseaux du Nany, du Verdanson et des Gaulies) issus des collines dominant le sud de la ville. Deux faibles hauteurs naturelles dominent légèrement la zone innondable, les puys Saint Martin et Saint Pierre. La ville est implantée sur des alluvions anciennes et récentes ainsi que sur des remblaiements anthropiques dans sa partie nord, sur les anciens marécages bordant la Corrèze.
Topographie et altitude
Environnement géographique
Bassin sédimentaire appelé Bas-pays de Brive, limité au sud-ouest par le Causse du Quercy, bordé au nord et à l'est par les formations cristallines du Plateau corrézien. Larges plaines alluviales séparées par des collines peu élevées. Sous-sols dominés par des formations de grès et de calcaire.
Réseau hydrographique
Historique des recherches
Les premières mentions de découvertes archéologiques sur la commune de Brive remontent au XIXe siècle, pour certaines non datées et/ou mal localisées. Concernant les périodes historiques et plus particulièrement l'Antiquité, on recense notamment et par ordre chronologique de découverte :
- le signalement de substructions et d'une monnaie de Majorien en or au lieu-dit Le Rey ainsi que du mobilier en plusieurs endroits au lieu-dit Le Rechaulier au XIXe siècle (Lintz 1992 : 75) ;
- la mention en 1880 d'un triens mérovingien découvert dans les environs de Brive, dont la légende Briva Vico suggère la présence d'un atelier monétaire mérovingien à Brive (Lintz 1992 : 75-76) ;
- la mise au jour en 1888 d'une plaque en grès portant une inscription en latin (cf. rubrique Sources) ;
- la découverte en 1907 d'un solidus de Valentinien III au lieu-dit Les Chapelies (Lintz 1992 : 75) ;
- l'observation des vestiges de deux culées de pont en 1934 près du Pont du Buis (ou Buy / Bouy) sur la Corrèze, interprétées comme les restes d'un pont romain d'environ 30 mètres de long détruit avant 1406 (Lintz 1992 : 75) ;
Il faut néanmoins attendre le milieu du XXe siècle pour trouver mention des premières fouilles archéologiques officielles à Brive, avec deux campagnes successives de sondages en 1953 et 1954 sur l'ancienne chapelle Saint Pierre. En parallèle, du mobilier archéologique est identifié en 1954 Place de la Halle ; c'est à nouveau le cas en 1972, rue Charles Teyssier cette fois.
L'année 1978 ouvre la décennie la plus prolifique du XXe siècle en matière d'opérations et de découvertes archéologiques à Brive, le plus souvent sous la houlette de François Moser (cf. plan). Presque chaque année apporte ainsi son lot de vestiges dans le centre-ville jusqu'en 1990 :
- la première étape est marquée par une fouille à l'extérieur et au nord-ouest de la nef de l'église Saint Martin en 1978, mettant au jour un ensemble de sarcophages en grès (Lintz 1992 : 75) ;
- en 1979, c'est au tour de l'ancienne église Saint Sernin (Place Jean-Marie Dauzier) d'être sondée et de révéler également une nécropole en sarcophages datée de l'époque carolingienne, mais aussi des niveaux de l'époque gallo-romaine (Lintz 1989 : 53-76) ; cette même année, des sondages sont également réalisés sur les sites dits de Rodas et du Rabelais (entre la Place de l'Hôtel de Ville et la rue du Docteur Massénat), révélant des vestiges antiques et surtout médiévaux (Moser 1982 : 148) ;
- les fouilles se poursuivent à Saint-Sernin en 1980, tandis que les premières découvertes fortuites de figurines en terre cuite antique ont lieu rue Charles Teyssier près de l'Hôtel de Ville (Moser 1982 : 148) ;
- en 1981, une fouille est entreprise rue Charles Teyssier, suite à la découverte l'année précédente des premières figurines antiques en terre cuite dans cette rue, marquant une première étape dans l'identification d'un atelier de production de figurines et céramiques dans la Brive antique (Moser 1987 : 77-89) ; à l'occasion de travaux en 1981 au nord de la Place de la Halle, des vestiges antiques ont été découverts et ont fait l'objet d"une importante fouille de sauvetage, étalée sur plusieurs mois (fouilles dites de la Vieille Halle puis CAF 1 à 4) ; cette même année, du mobilier antique a également été identifié dans l'ancienne rue Pierre et Marie Curie (actuelle Place de l'Hôtel de Ville) ;
- en 1982, du mobilier antique a été recueilli lors de travaux dans le secteur de la Place de la Halle (Moser 1983 : 103-104) ;
- en 1983, plusieurs lots de mobilier antique ont été identifiés au cours de travaux rue du Clocher, rue Blaise Raynal et rue du Perron (Moser 1984 : 131) ;
- une fouille a été réalisée en 1984 rue Marie-Rose Guillot, révélant notamment un puits duquel furent extraits des éléments lapidaires et du mobilier antiques ; ces fouilles sont complétées par des observations en 1986 (Moser 1985 : 120) ;
- l'année 1985 est marquée par une fouille de sauvetage au sud et à l'est de l'ancienne chapelle Saint Pierre, qui met notamment au jour des drains, des maçonneries ainsi que des fosses d'extraction d'argile gallo-romains (fouille poursuivie en 1986). Cette même année voit la découverte de vestiges bâtis et artisanaux antiques à l'Hôtel Labenche, de mobilier épars rue Basse et d'abondant mobilier à l'angle des rues de la Frappe et des Prêcheurs (Moser 1986 : 129-130) ;
- en 1986 une nouvelle fouille est réalisée rue Marie-Rose Guillot (Moser 1987 : 143), ainsi que Place Jean Charbonnel (actuelle Place de l'Hôtel de Ville), cette dernière ayant notamment permis l'identification de fours antiques ; rue Marie-Rose Guillot, ce sont cette fois des fosses renfermant des moules de vases de type Drag 37 qui furent exhumées au sein de niveaux antiques dans lesquels des maçonneries ont aussi été repérées (Moser 1987 : 77-89) ;
- en 1987 une fouille est réalisée au nord de l'ancienne chapelle Saint Pierre, qui met au jour de nouvelles structures artisanales interprétées comme les restes d'un atelier de coroplathe daté de la seconde moitié du IIe siècle (Moser 1988 : 151-152) ;
- en 1988 une fouille est conduite au musée Labenche, mettant en évidence sous les niveaux médiévaux quelques vestiges antiques dont d'importants niveaux de TCA (Moser 1989 : 134-135) ;
- en 1989, une fouille est réalisée sur deux parcelles au nord de la rue Massénat, à l'emplacement de l'ancien couvent des Clarisses (actuelles archives municipales), révélant des vestiges essentiellement médiévaux et modernes (Moser 1990 : 126-127) ;
- en 1990 des travaux d'agrandissement du restaurant La Truffe noire (Boulevard Anatole France) mettent au jour un four de briquetier médiéval et une zone de dépotoir antique (Moser 1991 : 169) ;
Il faut ensuite attendre le début du XXIe siècle pour que de nouvelles opérations archéologiques concernant l'Antiquité aient lieu, avec une série de diagnostics préventifs réalisés successivement en 2004 rues Massénat, Blaise Raynal et du Perron (Roger 2004, trois ref.). Le rythme des opérations s'intensifie dans les années 2010 :
- une fouille préventive a fait suite en 2012 à un diagnostic positif Place Charles-de-Gaulle et Place Latreille, aux abords de la collégiale Saint Martin. Elle a permis la mise au jour d'une aire funéraire datée du VIe au XVIIIe siècle, de plus de 600 sépultures, depuis le chevet de la collégiale jusqu'à son parvis ouest, ainsi que Place Latreille au sud. Des vestiges antiques ont également été perçus : murs, sols en béton de tuileau, mobilier, sans qu'ils aient pu être bien caractérisés (Barbier 2012) ;
- un diagnostic préventif est réalisé au lieu-dit Le Pilou en 2013, ne révélant pour la période antique que deux trous de poteau, un fossé et des fosses apparentées à des silos et datés du Ier siècle (Defay 2013) ;
- en 2016 la fouille préventive de l'îlot Massénat fait suite au diagnostic positif de 2004 ; des vestiges antiques (fosses avec foyers, trous de poteau et murs de fondation), perturbés par des aménagements plus tardifs, ont été observés sur environ 40 m² uniquement aux abords de la rue Blaise Raynal, révélant plusieurs indices d'une ancienne activité métallurgique dans cette zone. Le reste des vestiges s'étend chronologiquement du XIIe au XIXe siècle, témoignant de l'intégration progressive du faubourg médiéval à la ville moderne (Ollivier 2018) ;
- de 2018 à 2021, un suivi de travaux est réalisé sur une partie de la ville (rues Charles Teyssier, du Dr Massénat, Benjamin Delessert, Blaise Raynal et Avenue du Maréchal Foch). Les découvertes concernent essentiellement les époques moderne et contemporaine (vestiges de l'ancien couvent des Clarisses puis de Bonnesaigne, du couvent des Jacobins et de bâti civil). Les rares témoignages de l'Antiquité ont livré une hypothétique portion de voirie orientée nord-ouest - sud-est et quelques niveaux d'occupation datés du IIe et IIIe siècle (rapport en cours).
Sources
Auteur
Texte
Dans son Historia Francorum, Grégoire de Tours mentionne le vicus de Brive (Brivam-Curretiam vicum, Brivam vicum) avec une église incendiée en 584, dans le contexte du couronnement de Gondowald à Brive (Lintz 1992 : 70-71, Deloche 1863 : 156).
Auteur
Texte
L'évêque de Limoges Rurice Ier cite Brive (Brivae sis) dans une lettre datée des environs de l'an 480 (Deloche 1863 : 156).
Epigraphie
Chronologie
Evolution ultérieure
Eglise
Si oui : Date d'implantation
Chef-lieu de paroisse
Atelier de frappe monétaire mérovingien ?
Si Oui, nom ?
Vicus mérovingien ?
Si Oui, nom ?
Phasage:
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Siècle
Fiabilité
Topographie
Etendue supposée
Réseaux
Voies terrestres:
Identifiant
Organisation
Infrastructures liées à l'eau
Sources et puits
Edifices religieux et nécroples
Sépultures isolées
Identifiant
Type de sépulture
Contenant
Coffre funéraire
Identifiant
Type de sépulture
Contenant
Coffre funéraire
Activité, production et échanges
Artisanat
Le territoire
Terroir
Habitat rural
L'environnement immédiat de l'occupation antique localisée dans le centre-ville de Brive ne livre à ce jour qu'une seule occupation rurale : le site du Pilou, mis au jour lors d'un diagnostic préventif en 2012 (Defaye 2013).
Plusieurs mentions font état de mobilier archéologique antique dispersé en plusieurs endroits de la ville, sans qu'il soit associé à des structures archéologiques clairement identifiées.
Synthèse
Bilan
En l'état actuel des connaissances, le site antique de Brive apparait essentiellement comme un espace à vocation artisanale, dont l'activité est très majoritairement dominée par la production de vaisselles et figurines en céramique et dans une moindre mesure de terre cuite architecturale. On distingue deux phases de production distinctes, l'une allant de la fin du Ier à la première moitié du IIe siècle, l'autre couvrant la deuxième moitié du IIe et le début du IIIe siècle. Les découvertes archéologiques ont mis au jour les vestiges de fosses d'extraction d'argile et plusieurs fours de cuisson de productions variées : moules à figurines et à vases, céramique commune, à paroi fine, apparentée à de la sigillée, figurines en terre cuite, etc. Les études et analyses de céramique ont notamment permis d'identifier, par leur aspect ou grâce au contexte archéologique, trois grands ensembles plus ou moins homogènes : des parois fines ou apparentées, des productions diverses de la fin du Ier siècle et un ensemble hétérogène de productions du Ile siècle. L'artisanat métallurgique est également présent mais occupe a priori un rôle bien plus secondaire et n'a été pour l'heure identifié formellement que dans un espace très restreint en partie sud du site ; il semble être rattaché aux Ier ou IIe siècles uniquement.
Aucun édifice antique à vocation autre qu'artisanale n'a été clairement identifié jusqu'à présent, mais des indices d'une occupation résidentielle sont toutefois bien présents (au-delà de la vaisselle en céramique largement représentée sur l'ensemble du site) notamment en partie nord, avec des objets de la vie quotidienne : palette à fard, stylet en bronze (rue M-R Guillot), ainsi que quelques éléments lapidaires ou d'ornement (fragment de colonne en calcaire, polissoir en marbre réemployé, enduit peint). On peut souligner en revanche l'absence de système d'hypocauste et l'état très lacunaire des restes de construction maçonnée, mais le développement progressif de la ville du Moyen-Âge à aujourd'hui n'y est sans doute pas étranger. Des constructions en matériaux périssable sur solins en pierre ont également été identifiés.
L'ensemble des vestiges mis au jour recouvre une superficie d'un peu plus de 4 hectares, mais la zone de forte densité et de relative continuité des vestiges concerne guère plus de la moitié de l'emprise totale du site. Cette zone riche en vestiges s'étend du nord vers le sud de la Place de la Halle jusqu'au musée Labenche, sur une bande d'une largeur de quelques dizaines à une centaine de mètres. Une occupation est attestée dans l'environnement de la collégiale Saint-Martin, avec sol en béton de tuileau, murs et mobilier, qui semble marquer la limite occidentale du site. L'hypothèse d'un site aménagé le long de l'axe Limoges-Cahors est alors tentante, mais ce dernier n'est à ce jour pas archéologiquement attesté à Brive, de même que l'existence d'un carrefour avec l'axe Clermont-Ferrand - Périgueux. Il faut d'ailleurs souligner l'absence de trame urbaine antique reconnue sur le site de Brive. La courte portion de voie identifiée en 2019 rue Charles Teyssier apparaît très isolée dans une nappe de vestiges sans réelle trame établie, même si une majorité de maçonneries ou solins identifiés lors des fouilles anciennes suivent un axe directeur nord-ouest - sud-est comparable à celui de la portion de voie entrevue rue Charles Teyssier. Leur nombre et leur densité sont toutefois insuffisants pour en tirer des conclusions sur une possible organisation orthonormée de l'espace. Si les fouilles anciennes et récentes ont bien identifié des structures à vocation artisanale, toutes ont jusqu'à présent échoué à identifier formellement des vestiges d'habitat, d'édifice public ou cultuel. L'absence de fouille extensive de grande superficie peut expliquer ces lacunes, de même que les aménagements postérieurs à la fois nombreux et monumentaux dans cette partie de la ville : des dizaines de bâtiments civils (maisons, hôtels particuliers, immeubles), deux remparts successifs ainsi qu'une demi-douzaine d'établissements religieux au bas mot ont été érigés depuis l'époque médiévale sur l'emprise du site antique.
Il ne fait donc aucun doute que l'occupation gallo-romaine de Brive se caractérise par un centre de production de vaisselle et de figurines en terre cuite, organisé en plusieurs sites de production répartis autour du Puy Saint-Pierre. Cette production s'étale du Ier au IIIe siècle de notre ère et s'accompagne peut-être aux Ier et IIe siècle d'une production métallurgique (fer, bronze) secondaire voire domestique. Il apparaît très probable que le site ait également eu une vocation résidentielle de par la présence de mobilier domestique abondant dans l'environnement des structures artisanales, mais celle-ci n'est pas formellement identifiée. Par ailleurs, aucun édifice pouvant suggérer l'existence d'une agglomération secondaire n'a été mis au jour sur place ni aux abords du site. Les indices d'infrastructure routière sont à ce jour insuffisants pour valider l'hypothèse d'un lieu de production et de résidence installé au carrefour de deux routes d'importance : l'itinéraire Limoges-Cahors avec une portion de voie aménagée (peut-être celle repérée rue Charles Teyssier) d'axe nord-sud et l'itinéraire Clermont-Ferrand - Périgueux dont les piles d'un ancien pont dit romain (près du Pont du Buis) témoigneraient du franchissement de la Corrèze selon un axe nord-est - sud-ouest. Aucun de ces itinéraires n'étant formellement attesté dans l'environnement immédiat du site antique de Brive à l'heure actuelle, les motifs d'implantation de ce dernier sont peut-être à aller chercher ailleurs, notamment dans la présence avérée de bancs d'argile et de ressource en eau abondante sur un espace en partie protégé des crues de la Corrèze, comme l'a démontré François Moser lors de ses travaux.
L'occupation antique du centre-ville ne semble donc pas constituer une agglomération secondaire à part entière au regard de la documentation rassemblée. Toutefois, elle est sans doute en relation étroite avec un ou d'autres sites relativement proches géographiquement. À environ deux kilomètres plus à l'est, un diagnostic à mis au jour en 2013 les restes bien conservés mais très lacunaires d'une occupation de type rural au lieu-dit Le Pilou (Defaye 2013) ; celle-ci semble toutefois assez modeste et trop éloignée de l'occupation du centre-ville pour que cette dernière y soit rattachée. En revanche, la commune voisine de Malemort-sur-Corrèze renferme les restes d'une occupation d'importance, mise au jour lors de plusieurs opérations dans les années 2000 et 2010. Le site de Cazaudet s'étend sur environ dix hectares en rive droite de la Corrèze, près de la confluence de celle-ci et du ruisseau de la Couze. Une première occupation de l'époque laténienne a été mise en évidence au sud, l'occupation antique se situant principalement en partie nord de l'ensemble. Le site antique de Cazaudet n'a pas pu être caractérisé formellement, mais il peut être considéré comme un candidat plausible au statut d'agglomération secondaire de par sa superficie, son organisation spatiale, sa densité de vestiges. Bien que distant de plus de cinq kilomètres à vol d'oiseau du site artisanal antique de Brive, il ne faut pas exclure un lien étroit entre les deux, qui partagent au demeurant une chronologie très proche (Ier-IIIe siècle). Des productions en céramique (vaisselle, figurine) issues des ateliers de Brive ont également été mises au jour à Malemort.